Alors que Nafissatou Diallo brise le silence et raconte sa version des faits dans Newsweek et dans une interview sur ABC diffusée mardi soir (et ce mercredi matin sur i>télé), la date de la prochaine audience consacrée à l'affaire Dominique Strauss-Kahn a été repoussée du 1er au 23 août.
"Nous avons donné notre accord pour repousser l'audience devant le juge Michael Obus du 1er août au 23 août", ont indiqué dans un communiqué, mardi, les avocats William Taylor et Benjamin Brafman, qui défendent l'ancien patron du FMI. "Nous croyons savoir que le procureur continue d'enquêter. Nous espérons qu'il aura pris, d'ici le 23 août, la décision d'abandonner." Rappelons que sept chefs d'accusation pèsent sur DSK, dont celui de viol. Il a plaidé non coupable. Cela fait donc le troisième report : initialement prévue le 18 juillet, l'audience avait déjà été repoussée au 1er août, et nous voici maintenant au... 23 !
Le bureau du procureur de Manhattan Cyrus Vance Jr. a confirmé ce report en précisant que "l'enquête dans le cadre de cette affaire pénale en cours se poursuit".
Comme le souligne l'AFP, cette audience est très importante et pourrait aboutir à l'abandon des poursuites - envisagé depuis que la crédibilité du témoignage de la victime présumée a été remis en cause, entraînant la libération sur parole de DSK et le rendu, à Anne Sinclair, de la caution de 6 millions de dollars - tout autant que permettre de fixer une date de début de procès...
Témoignage à double tranchant
Ce report intervient alors que Nafissatou Diallo se raconte dans les médias. Son récit du 14 mai, date du présumé viol, a été qualifié de "net et convaincant" par Newsweek, qui l'a longuement interviewée. La femme de chambre de 32 ans du Sofitel, d'origine guinéenne, s'est également racontée sur ABC. L'entretien réalisé par la journaliste Robin Roberts a été diffusé en intégralité hier soir dans l'émission Nightline. Son récit du viol présumé est graphique, parfois difficile à regarder. Elle s'explique aussi sur ce coup de téléphone donné, 28h après l'agression, à un détenu à qui elle aurait déclaré "Ne t'inquiète pas, ce type a beaucoup d'argent, je sais ce que je fais". Nafissatou Diallo parle d'un "malentendu".
Les avocats de DSK accusent la jeune femme de 32 ans de "se lancer dans une campagne médiatique visant à forcer un procureur à maintenir ces accusations contre un innocent, ce même innocent dont Melle Diallo veut obtenir de l'argent".
L'AFP a interrogé deux spécialistes américains sur le sujet. Pour Brenda Smith, juriste à l'American University de Washington, cette offensive médiatique est à double tranchant, mais "le moment a été choisi pour augmenter la probabilité que le parquet continue, pour que l'indignation soit intacte. Les procureurs sont très sensibles à l'opinion publique". Au contraire Matthew Galuzzo, ancien procureur justement au sein de l'unité des crimes sexuels de Manhattan, estime la stratégie de Kenneth Thompson, avocat de Diallo, douteuse : "Le fait d'avoir besoin de faire ce genre de choses tend à indiquer qu'il ne s'est rien passé. S'il s'était effectivement passé quelque chose, (Melle Diallo) n'aurait pas besoin de faire tout cela." Selon lui, le camp Diallo pose les bases d'une procédure au civil, afin d'obtenir des dommages et intérêts.
C'est effectivement son intention : Kenneth Thompson a annoncé dans le New York Times qu'une plainte au civil allait être déposée dans la semaine.