Depuis 2014, Jeffrey Tambor pouvait s'enorgueillir de tenir le premier rôle d'une série qui a fait de l'identité de genre son motif principal : pour son incarnation de Maura Pfefferman, ce professeur à la retraite qui révèle à ses trois enfants son identité transgenre dans Transparent (Amazon), l'acteur américain de 73 ans a même reçu le Golden Globe et l'Emmy Award du meilleur acteur. Mais le rôle qu'il se trouve actuellement à jouer, lui aussi incriminé dans la déferlante née du scandale Weinstein, est incompatible : aussi a-t-il décidé de quitter la série...
Accusé par sa collègue l'actrice transgenre Trace Lysette, qui incarne dans le show son amie Shea, d'avoir eu un comportement inapproprié sur le tournage, Jeffrey Tambor vient d'annoncer dimanche 19 novembre 2017 qu'il ne reviendrait pas dans Transparent. "Jouer Maura Pfefferman dans Transparent a été l'un des plus grands privilèges et l'une des plus créatives expériences de ma vie, a-t-il confié au site spécialisé Deadline.com. Mais ce qui est en revanche apparu clairement au cours des dernières semaines, c'est que ce n'est plus le job pour lequel j'avais signé il y a quatre ans. Compte tenu de l'atmosphère politisée qui semble avoir affecté notre plateau, je ne vois pas comment je pourrais revenir dans Transparent."
Bon Dieu, j'ai envie de t'agresser sexuellement
Quelques jours plus tôt, Trace Lysette, qui a confié par le passé s'être prostituée pour survivre, révélait avoir vécu "de multiples expériences inconfortables" avec Jeffrey Tambor, déjà mis en cause précédemment par son assistante, Van Barnes. "Jeffrey, relatait Tracy, a fait nombre d'avances et de commentaires sexuels me concernant, mais un jour, c'est devenu physique. Un jour, nous étions sur le tournage de la saison 2 et Alexandra Billings et moi étions en pyjama. Je portais un haut léger et un short très court. En me voyant dans mon costume, Jeffrey m'a sexualisée en faisant un commentaire qui dépassait les bornes : "Bon Dieu, Trace, j'ai envie de t'agresser sexuellement." Alexandra et moi avons choisi d'en rire, parce que c'était tellement absurde et que nous croyions à une mauvaise blague. J'ai laissé glisser. Mais plus tard, entre deux prises, j'attendais dans un coin du plateau (...), adossée contre le mut, quand Jeffrey s'est approché de moi. Il est venu très près, a placé ses pieds nus sur les miens de telle sorte que je ne pouvais pas bouger, a penché son corps contre le mien et a commencé à faire de discrets va-et-vient contre mon corps. Je sentais son pénis contre ma hanche à travers son fin pyjama et je l'ai repoussé. Là encore, je n'ai pas pris cela au sérieux et j'ai levé les yeux au ciel. J'avais un boulot à faire et je devais le faire avec Jeffrey, le principal protagoniste de notre série. Quand ils ont dit "action", j'ai mis cet épisode dans un coin de mon esprit. Compartimenter a toujours fait partie de mon kit de survie (...) J'avais eu l'habitude d'être traitée comme un objet sexuel par les hommes - sauf que celui-là était célèbre."
Je ne suis pas un prédateur
Un récit auquel l'intéressé, père de quatre jeunes enfants avec sa femme Kasia et de deux filles adultes issues de précédentes relations, a réagi au bout de quelques heures : "Je me trouve accusé d'un comportement que toute personne civilisée condamnerait sans réserve, déplorait-il tout en soulignant sa fierté de participer à une série qui brise le tabou et fait évoluer les mentalités sur l'identité de genre. Je sais que je n'ai pas toujours été la personne avec laquelle il est le plus facile de travailler. Je peux être versatile et grincheux, et bien trop souvent j'exprime mon opinion avec rudesse et sans tact. Mais je n'ai jamais été un prédateur - jamais. Je suis profondément désolé si qui que ce soit a pu mésinterpréter l'un de mes actes comme étant sexuellement agressif ou si j'ai un jour offensé ou blessé qui que ce soit. Mais le fait est, en dépit de tous mes défauts, que je ne suis pas un prédateur et que l'idée qu'on puisse me voir comme tel est plus choquante que je ne saurais le dire." Dimanche, il a renchéri en insistant sur le fait que lui prêter l'intention "d'harceler délibérément qui que ce soit est tout simplement faux, au plus haut point".
Entre-temps, la créatrice de Transparent, Jill Soloway, avait été invitée à s'exprimer sur le scandale lors d'un événement à Los Angeles, samedi. "Il y a des gens qui nous font savoir qu'ils ne se sentaient pas en sécurité et que des choses se passaient", a-t-elle seulement lâché, justifiant sa réserve par le fait qu'une enquête est en cours. En attente d'un peu plus de transparence, donc...