Attendu en mars, le nouvel album de Björk a fuité ce week-end sur Internet. À l'instar de Madonna, la star islandaise a dû agir vite : Vulnicura - titre de ce 8e album studio - est désormais disponible sur les plateformes de téléchargement légal. C'est un album très particulier pour Björk, le plus intime qu'elle ait jamais composé ou écrit. Elle y parle pour la première fois de sa rupture avec Matthew Barney, le père de sa fille Isadora, après quinze ans d'amour.
Nerd
Dans une grande interview accordée à Jessica Hopper pour Pitchfork.com, Björk (49 ans) revient sur la genèse de Vulnicura. Parfois en larmes quand elle évoque les thèmes profonds de l'album, elle raconte cette rupture, la plus douloureuse de son existence.
La chanteuse et l'artiste contemporain Matthew Barney vivaient à New York. Parents d'une petite Isadora, âgée de 12 ans, ils ont collaboré à l'oeuvre Drawing Restraint 9 dans laquelle ils apparaissent tous les deux et dont l'Islandaise signe la bande originale. Dans cette interview sur Pitchfork, on comprend que la séparation doit avoir au moins deux ans et que la réponse de Björk a été d'écrire de nouvelles chansons : "Quand j'ai fait ce disque, tout venait de s'écrouler autour de moi. Je n'avais plus rien. C'était la chose la plus douloureuse qui me soit jamais arrivée dans la vie. Pour tenir le coup, je me suis mise à composer pour les cordes. J'ai décidé de devenir une nerd du violon et d'aller plus loin encore dans ce domaine." L'Islandaise souligne la simplicité de ses textes qu'elle décrit comme adolescents : "Quand j'écoute ces chansons, c'est comme lire un journal intime. (...) Je suis très nerveuse. Vraiment. D'autant plus après un album comme Biophilia qui parlait de l'univers. Mes nouvelles chansons sont plus traditionnelles. Quand j'ai commencé à écrire, j'ai lutté contre ça. J'ai pensé que c'était trop ennuyeux et prévisible." Mais finalement, Björk y a vu quelque chose d'universel.
Puis l'enregistrement a évolué grâce à l'arrivée du jeune Arca qui a coproduit la majorité des chansons avec Björk : "J'étais comme dans un film de Bergman avec Liv Ullmann quand on ne fait que s'apitoyer sur soi-même ; c'était comme pratiquer une opération de chirurgie sur moi-même pour savoir ce qui avait bien pu mal tourner. Puis j'ai eu un gros coup de chance. Je ne suis pas religieuse mais je dois avoir un bon karma parce qu'Alejandro est arrivé et m'a sortie de là."
Arca
Alejandro Ghersi, dit Arca. Nous sommes à la fin de l'été 2013, il vient de collaborer avec Kanye West sur l'album Yeezus et rêve de travailler avec l'Islandaise. "Je ne veux pas me vanter, poursuit Björk. Mais je reçois beaucoup de demandes de collaborations et je réponds souvent non. Arca m'a approchée et le timing était juste parfait. (...) Il est venu en Islande et on a passé un moment génial. Il est généreux, drôle. Je n'en reviens pas de ce contraste entre le plaisir que j'ai pris à travailler avec lui sur une disque dont le sujet est si dramatique."
Né en 1990, Arca est vénézuélien. C'est un fan et un spécialiste de l'oeuvre de Björk. "Au début, j'étais sur la défensive. Je ne suis pas très douée avec les fans, admet la chanteuse. Mais, ce n'était pas du tout ce genre d'énergie. C'était très positif, il était comme un étudiant et, soudainement, je suis devenue ce professeur un peu bizarre. Je m'asseyais à ses côtés et je décrivais les sons que je désirais. (...) C'était la première fois que je faisais un truc pareil. Je suis restée assise à côté de lui pendant des semaines et nous avons fait tout l'album ensemble. Je n'ai jamais travaillé aussi vite. Il est incroyablement talentueux et veut apprendre. C'est ce qu'il y a de fou dans la vie, deux personnes qui viennent de directions complètement opposées et qui ont tellement à s'apprendre. C'est un album étrange... À la fois le plus douloureux et le plus magique."
Au moment la sortie physique de Vulnicura en mars, Björk et Arca se retrouveront à New York pour quelques concerts intimes dont les premiers se tiendront au mythique Carnegie Hall. L'artiste appréhende d'interpréter devant un public ses nouvelles chansons : "Je ne sais pas comment je vais faire. (...) Ça sera forcément très fort. Je vais juste pleurer, être dans tous mes états et le faire."
The Invisible Woman, conversation avec Björk à lire sur Pitchfork.com