Un look de vieux rockeur aux tatouages noirs, une gueule de survivant, du réel dans la voix, mais surtout une plume et une poésie indéniables. Daniel Darc a été retrouvé mort le 28 février à son domicile par son producteur. Il pourrait avoir succombé à un mélange d'alcool et de médicaments. Il avait 53 ans et un double statut d'icône : icône de la scène rock et new wave française grâce à son groupe Taxi Girl, et de la chanson française avec sa carrière solo dont le sommet sera l'album Crèvecoeur en 2004.
Délices et envies
C'est d'abord sur la Toile que la triste nouvelle se propage et c'est évidemment sur la Toile que les premiers hommages sont rendus. Alizée est l'un des premières à réagir sur Twitter : "'Hier nevermore Mais hier a tort Aujourd'hui vois-tu C'est jamais plus' Merci Daniel Darc..." a publié la jeune star à qui Daniel Darc et son complice Frédéric Lo ont écrit et composé Jamais plus et Lonely List pour l'album Psychédélices (2007). Durant sa carrière, Daniel Darc a aussi écrit pour Marc Lavoine, Marie-France, Berry ou Thierry Amiel.
Toujours sur Twitter, Emma de Caunes raconte l'avoir reçu dans son émission : "Daniel Darc... Je me souviens, sur le plateau de la Musicale. Si doux. On avait parlé de Johnny Cash... et de chanter ensemble. Paix à son âme." Bertrand Burgalat avait invité Daniel Darc à participer à son Année bisexuelle, un spectacle musical pour la chaîne Paris Première. C'était le 23 février dernier : "Il a joué de l'harmonica et improvisé sur mon instrumental Aux Cyclades électroniques, a raconté Burgalat au Figaro. Il était très en forme, je l'ai trouvé bien plus solide que lorsque je l'ai connu il y a une vingtaine d'année. Il voulait qu'on refasse des choses ensemble."
Daniel Darc n'avait pas l'intention de s'arrêter. Il travaillait actuellement sur un nouvel album avec le compositeur Laurent Marimbert avec qui il signait, en 2011, La Taille de mon âme qui contient le très beau Je suis le printemps. Il souhaitait aussi retrouver Frédéric Lo, son complice sur Crèvecoeur : "Ce disque a changé nos vies respectives, confie Lo au Figaro. J'ai adoré bosser avec lui. On a dû faire une cinquantaine de titres en tout. Récemment, on parlait de recommencer à travailler ensemble." Il venait aussi de commencer l'introspection nécessaire à la rédaction d'une autobiographie avec la complicité du journaliste Bertrand Dicale.
Mourir comme Hemingway
Dans un long communiqué, la maison de disques Sony se souvient : "De l'artiste, nous retiendrons l'oeuvre, le plaisir qu'il avait à être sur scène, les tourments et l'exigence qui hantaient sa création. De l'homme, nous retiendrons la gentillesse, l'intelligence, l'humour, l'humilité et l'extrême sensibilité qui le caractérisaient." Pour la SACEM, dont il était membre depuis 1980, Daniel Darc "a flirté longtemps avec la mort, triché avec la vie, vivant chaque instant avec l'intensité des êtres qui ne comptent rien. Permanent de tous les excès, il laisse le souvenir d'un homme sensible, cultivé et spontané, d'un être en dehors des cases."
Dans J'irai au Paradis, paru sur l'album Amours suprêmes (2008), Daniel Darc chantait qu'il avait passé sa vie en enfer. Et puis, l'été dernier sur France Culture, il confiait à propos de la mort : "Je voulais mourir à 21 ans comme Eddie Cochran, puis à 24 ans, comme James Dean, après j'ai pensé à 27, comme tout le monde. Après 36 ans, comme Gene Vincent et Charlie Parker. Et maintenant, pfff... Hemingway, vieux !" L'écrivain américain est mort à 61 ans, on aurait aimé que Darc ait ces quelques années de plus.