Madame Claude : Mort à 92 ans de la "maquerelle de la République"
Publié le 23 décembre 2015 à 16:10
Par Benoit Z.
La plus célèbre des proxénètes est morte le 19 décembre. Et, avec elle, une certaine idée de la prostitution. Entre secrets d'État, prison et légende, Madame Claude a écrit son nom dans l'Histoire.
Madame Claude, née Fernande Grudet, le 6 mai 1986 sur un plateau de télé à Paris Madame Claude, née Fernande Grudet, le 6 mai 1986 sur un plateau de télé à Paris© BestImage
Madame Clause, née Fernande Grudet, sur le plateau de l'émission Ex Libris, le 14 juin 1994 à Paris
Madame Claude (Fernande Grudet) et l'écrivain Jean d'Ormesson, le 6 mai 1986 sur un plateau de télé à Paris
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Elle avait pour habitude de faire monter ses clients au septième ciel. Le 19 décembre dernier, c'est elle qui est montée au paradis. Madame Claude, la plus célèbre des proxénètes, est décédée à Nice à l'âge de 92 ans.

Services secrets, carnets noirs et chefs d'état

Son nom est le symbole dans le monde entier d'une prostitution de luxe. Elle voulait "rendre le vice joli". Pendant des années, Madame Claude a été à la tête d'un réseau de proxénétisme international, fournissant ses puissants clients en filles soigneusement choisies, recrutées dans les castings, sur les terrasses des cafés ou dans les boites de nuit branchées. Dans les années 1960 et 1970, elle était incontournable pour qui voulait s'amuser. Dans ses deux carnets noirs, qui ont longtemps alimenté la légende, les noms des filles qui travaillaient pour elle, et ses clients : chefs d'État, acteurs, industriels, patrons du CAC 40, politiques... Certains d'entre eux sont connus, comme le shah d'Iran, JFK ou le patron de Fiat, Giovanni Agnelli.

Moyennant 15 à 20 000 francs de l'époque (1 500 à 2 300 de nos euros), dont 30% lui revenaient, les "amis" de madame Claude pouvaient s'offrir ses filles, réputées pour être les plus belles de Paris. Durant deux décennies, elle va ainsi régner sur plus de 500 filles, et quelques garçons, qui lui rapportent les confessions sur l'oreiller de leurs clients et que Madame Claude monnaie en échange d'une protection auprès de la Brigade mondaine (répression du proxénétisme) ou du Service de documentation extérieure et de contre-espionnage (Sdece, devenu la DGSE).

Fisc, fuite et fin

Pourtant, tout ne sera pas rose. "La maquerelle de la République" voit ses carnets saisis par la justice en 1972. Le fisc calcule son chiffre d'affaires et lui réclame 1,7 million d'euros. L'élection de Valérie Giscard d'Estaing deux ans plus tard met un terme à ses protections et l'oblige à fuir aux États-Unis, alors qu'elle est condamnée en 1976 à dix mois de prison avec sursis et 1,7 million d'euros d'amende pour fraude fiscale.

Fin 1985, Madame Claude rentre en France, purge une partie de sa peine et replonge quelques années plus tard en montant un nouveau réseau de prostitution. En 1992, elle est condamnée pour proxénétisme aggravé à trois ans de prison - dont six mois ferme. C'est a la dernière fois que l'on entendra parler de Madame Claude, avant son décès ce 19 décembre à Nice, où elle s'est éteinte à l'hôpital Cimiez après deux ans d'hospitalisation, emportant avec elle ses secrets.

Madame Claude, une histoire cachée

Derrière ce personnage, figure emblématique des années 1960 et 1970, se cachait Fernande Grudet, née le 6 juillet 1923. Si elle prétendait être la fille d'un père ingénieur, soeur de trois frères et ayant vécu la déportation à Ravensbrück, la vérité était tout autre. Son père était ouvrier et elle n'avait qu'une soeur. Fille-mère pendant l'occupation, elle rejoint Paris à la libération où elle se prostitue du côté de l'Opéra avant de débuter sa carrière de proxénète en 1957.

Bourgeoise aux manières éduquées, charmeuse et adepte du luxe - elle avait gardé son manteau de vison lors de son incarcération en 1985 -, Madame Claude s'était donnée cette image qu'elle tenta de transmettre à son réseau. "J'ai essayé, et quelque part réussi, à enlever tout ce qu'il y avait de laid et de bas dans cette profession", expliquait-elle lors de ses rares interviews, comme celle donnée au Parisien : "Les filles travaillaient et me quittaient librement. Je leur donnais une bonne éducation. Pour certaines d'entre elles, j'ai peut-être été une deuxième mère."

"Elle emporte avec elle secrets d'alcôve et secrets d'État. C'était une légende", a réagi mardi auprès de l'AFP l'ancien patron de la PJ parisienne Claude Cancès, ajoutant qu'il s'agissait "d'une autre époque". Une autre époque qui aura marqué le monde entier...

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