






En 2024, François Pinault est sorti du classement des 100 personnes les plus riches au monde. Le fondateur de Kering voit depuis quelque temps son fils François-Henri Pinault tenter de redresser la plus grande marque de leur conglomérat de luxe français, Gucci. Car dans la famille Pinault, la prise de pouvoir du fils cadet, François-Henri, s’est faite de façon progressive, et bien sûr selon la volonté de François père. Car c'est sur lui que son choix s'est porté et ce depuis l'adolescence du cadet. Teint et yeux clairs de Bretons, François-Henri est le quasi sosie de son paternel. Il a tenu à ce que ses trois enfants (il est aussi le père de Laurence et Benjamin) ne soient pas des "gosses de riche", François Pinault est de son côté fils de paysans. Si Bernard Arnault est l'un des seuls grands patrons industriels français à s'être impliqués dans l'éducation de ses enfants, ce n'est pas vraiment le cas de Pinault. Au divorce de leur mère, Louisette Gautier, il les laissera vivre chez elle, à Rennes, en les accueillant un week-end sur deux. Mais comme le rapporte l'enquête de Raphaëlle Bacqué et Vanessa Schneider, grands reporters au Monde, seule son ascension le préoccupe, et le samedi matin, François-Henri alors encore tout jeune est condamné à suivre son père dans son bureau, et s'y ennuyer.
Et ce père autodictate va alors avoir une seule obsession, révèle le livre des journalistes, Successions (éditions Albin Michel). Que ses enfants ne fassent pas comme lui, à savoir ne pas suivre d'études. Il tient à ce qu'ils aillent dans des grandes écoles. Car pour François Pinault, il s'agit là d'un grand regret. Selon lui, cela aurait changé beaucoup de choses dans sa vie. Et lorsque celui qui est désormais l'époux de Salma Hayek a 17 ans, son père commence finalement à exercer une pression sur sa réussite scolaire, ainsi que sur celle de ses frère et soeur. "Il nous a toujours dit que les études étaient importantes, précise ainsi François-Henri, son digne héritier, que s’il en avait fait, il serait allé plus vite." Mais François-Henri Pinault voit pourtant les choses autrement. Lui qui a rejoint son père à Paris, où il est entré dans le lycée d'élite privée Stanislas, avant d'intégrer une classe préparatoire d'école de commerce, désire tout arrêter. Il entend changer de voie. Son paternel s'en souvient encore. "Il est venu un jour me voir dans mon bureau avenue de Messine avec une brochure 'Comment devenir expert comptable en deux ans', se souvient le père. Il voulait arrêter, il avait un moment de découragement. Je lui ai dit : 'Rentre à la maison travailler, tu continues'." Pas question pour le fondateur du groupe Artémis de voir ses enfants marcher dans ses pas, lui qui a quitté l'école à 16 ans. Si l'homme de 88 ans s'exaspère aussi de ces "jeunes gens frais émoulus des grandes écoles qui n’ont pas, comme lui, ce sens quasi instinctif du commerce", il connait en revanche mieux que personne "les barrières dressées devant les autodidactes".
François-Henri Pinault a fini par écouter son père et décrocher HEC en 1985. Ce qui fera la fierté du paternel. Et alors que Laurence et Dominique se lancent dans des études de droit, le cadet devient alors le seul à se former au monde de l’entreprise. "Après HEC, il est allé faire son service militaire au consulat de France à Los Angeles, et il ne voulait plus repartir, poursuit son père. Je suis allé le voir et je lui ai dit : 'Reviens, tu me succéderas un jour, je te donnerai les clés'." L'héritier finira par céder et entrer au groupe Pinault SA, en 1987.