"Même les amis triés sur le volet qui saisissent leur image avec leur portable lors d’un dîner doivent promettre de ne rien divulguer", rapporte Le Monde. La scène résume à elle seule le mode de vie d’Alain et Gérard Wertheimer, héritiers de Chanel et figures d’une rare discrétion dans un univers où le prestige et la visibilité sont monnaie courante.
Les deux frères, respectivement âgés de 75 et 73 ans, possèdent 100 % de la maison Chanel, l’un des fleurons mondiaux du luxe. Pourtant, ils échappent avec constance aux caméras. Lors des défilés, on ne les trouve ni au premier rang ni en coulisses : ils choisissent des places reculées, quittent les lieux avant les embrassades, et se fondent dans la foule avec leurs chapeaux de feutre. Une amie proche résume cette attitude d’un trait : "Venir pour ne pas être vus, c’est le contraire de ce que font la plupart des gens !"
Cette culture de l’ombre s’étend à tous les aspects de leur existence. Selon nos confrères du quotidien, ils ne donnent presque jamais leur numéro de téléphone et demandent à leurs proches de le garder secret. À Genève, où vit Gérard (il est d'ailleurs le plus riche du pays, ndlr), même les cercles mondains les plus fermés ignorent son visage. Quant à Alain, installé à New York, il lui est arrivé d’être refoulé à l’entrée d’un défilé Haute couture, faute d’invitation : personne n’avait reconnu l’un des maîtres de la maison Chanel. Un comble.
Leur discrétion se double d’un refus assumé de la scène politique et médiatique. En 2022, lors de l’inauguration du bâtiment 19M, haut lieu des métiers d’art de Chanel, ce n’est pas eux qui accueillirent le président Emmanuel Macron, de peur d’apparaître à la télévision. Contrairement à Bernard Arnault, leur grand rival du luxe, on ne les croise jamais dans les dîners de l’Élysée.
Ce goût du retrait ne les empêche pas de piloter avec rigueur un empire de 32 000 salariés et un chiffre d’affaires de près de 20 milliards d’euros. Toujours selon Le Monde, Alain supervise la stratégie et l’image de la maison, tandis que Gérard, plus chaleureux, veille notamment sur leurs écuries de course. Mais toujours à distance, loin des flashes. Karl Lagerfeld, qui fut leur directeur artistique durant plus de trois décennies, servait de paravent idéal : il attirait toute la lumière, laissant les propriétaires dans l’ombre.
Cette pudeur médiatique est aussi héritée de leur mère, Eliane Heilbronn, avocate influente qui répétait à ses fils "de ne pas faire de bruit". Elle leur a transmis l’idée qu’un pouvoir se manie dans la retenue, sans ostentation. Aujourd’hui encore, la quatrième génération, leurs enfants et neveux, perpétue cette discrétion : aucun n’expose sa vie sur les réseaux sociaux, aucune réunion familiale ne filtre dans la presse.
Si la fortune des Wertheimer les place au sommet des classements mondiaux, leur image publique demeure quasi inexistante. Leur secret est simple : laisser Chanel rayonner, tout en effaçant leur propre silhouette. Une manière de rappeler qu’au pays du luxe, la plus grande élégance reste parfois… l’invisibilité.
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