Pierre Sarkozy zen, proche de Nicolas, fier de Carla : un discours bien huilé...

D'abord, une photo, non datée, du chef de l'Etat et de l'aîné de ses rejetons, Pierre Sarkozy, paisible scène de la vie de famille, en vacances dans le Sud, qui témoigne de leur belle entente : Nicolas Sarkozy, 56 ans, encore en tenue de cycliste après son escapade matinale, se détend à la terrasse d'une pizzeria, la main posée sur le bras de son grand garçon de 27 ans, torse nu et lunettes hype. De francs sourires complices. Puis, plus bas, en miniature, deux clichés nocturnes de Pierre Sarkozy sous son nom de scène de DJ Mosey, bras dessus bras dessous avec la journaliste de Blick Flavia Schlittler, et aux platines. Le décor de l'interview de Pierre Sarkozy par Blick est planté.

En Suisse, on a parlé de "LA fête estivale de l'année" : la venue de DJ Mosey aux platines de la discothèque à ciel ouvert de l'hôtel cinq étoiles Baur au Lac à Zürich était un énorme événement. Et le maître de cérémonie, accompagné par deux managers et logé dans la suite deluxe de l'établissement, n'a pas déçu, offrant trois heures de beats, dont le site hélvétique Starlounge livre quelques images, à une jeunesse dorée présente en masse pour l'entendre dans ses oeuvres.

A l'occasion de son premier set dans la plus grande ville de Suisse, Pierre Sarkozy, qui a désormais ses habitudes du côté d'Ibiza (notamment au Privilège) ou de Berlin, a accepté d'être suivi par une reporter du tabloïd Blick et de répondre à ses questions. Un entretien très étonnant... dans ses évidentes similitudes avec l'interview choc accordée en juillet au Bild am Sonntag allemand. Certes moins copieuse et moins approfondie, la séance de questions-réponses contient des phases de copier-coller assez frappantes. Suffisamment pour qu'on se demande si Blick n'a pas carrément récupéré l'interview précédente, ou, plus vraisemblablement, si le discours du très réservé Pierre Sarkozy n'est pas, tout simplement, bien huilé. La seconde option ne manque pas de crédit, surtout considérant la nature discrète du jeune homme, épanoui et heureux d'avoir commencé à faire son trou et à vivre de sa passion pour la musique. Une nature simple qui lui confère une cote de popularité grandissante.

Fou de son au point d'abandonner ses études de droit pour se lancer à fond dans la production et le DJeing, on souhaite effectivement à Pierre Sarkozy, alias DJ Mosey, de savoir renouveler ses sets mieux que ses interviews.

Il a dit, il a redit

Petit comparatif de morceaux choisis des deux entretiens. Le parcours est forcément balisé, pour qui interviewe le fils électron libre (contrairement à son cadet Jean, qui a embrassé une carrière politique comme papa) du président français : la musique, la jeunesse, la relation avec son père, la relation avec l'épouse enceinte - Carla Bruni - de ce dernier, sont les figures imposées de l'exercice. En revanche, le thème de la vie personnelle de Pierre Sarkozy reste terra incongnita, à peine approchée... Pour preuve, la principale révélation de cette interview internationale est... que Pierre Sarkozy préfère caresser les moutons corses que se frotter aux clubbers. Sous l'aspect folklo, admettons que le garçon a le courage de ce genre de confidences, et ne dérive pas de sa ligne de conduite : assumer sa personnalité, nature.

La musique

Il a dit : "J'avais peur de prendre froid, mais une fois derrière mes platines, en tête d'affiche, j'ai complètement oublié ma condition physique. J'ai trouvé ça génial. J'ai vu plein de beautiful people bien habillés et prenant du plaisir. Qu'ils le doivent à ma musique me rend vraiment heureux (...) Chacun doit être soi-même. Oublier les différences sociales et les codes. Ne pas se préoccuper de ce que les autres pensent. Quand je suis responsable de cette sensation-là chez les gens, j'ai atteint mon but."

Il avait dit : "Dans les clubs français, je me tiens en retrait à cause de mon nom. Mais j'aime ça, me produire pour des milliers de personnes. Au début je suis toujours un peu nerveux, mais quand toute la salle danse sur la musique, c'est une sensation incroyable, une énergie fantastique. Là, je me sens vivant."

Un garçon clean

Il a dit : "Je condamne quiconque prend de la drogue. Je n'en prends pas. Ma passion, c'est la musique, que j'ai la chance de vivre à fond. Je n'ai rien à compenser. Et je suis bien sage : je ne fume pas et je ne bois qu'un verre de vin de temps en temps, à table."

Il avait dit : "Je ne bois pas, à part un verre de vin à table de temps en temps. Je ne fume pas, je ne me drogue pas, et je suis sportif, je joue au foot." Son exemple : David Guetta, modèle de vie disciplinée.

L'abandon de ses études de droit

Il a dit : "Je n'ai absolument aucun regret. La musique a toujours été mon grand amour. Déjà enfant, j'avais composé des morceaux pour mes amis. A 14 ans, j'ai fondé le groupe de rap New hip Soul. On était épouvantable. Personne ne voulait nous voir, encore moins nous entendre. Puis, en parallèle de mes études, j'ai fondé mon propre label. Plus j'avais de boulot, moins j'étudiais. La révélation est venue quand, à 20 ans et quelques, j'ai eu en main mon premier chèque pour un cachet de DJ. C'est là que j'ai décidé d'en faire mon métier."

Il avait dit : "Je n'étais pas fait pour les études. A ce niveau-là j'étais plutôt un cancre. J'étais perdant d'avance, il faut aimer son travail pour réussir (...) J'ai reçu mon premier chèque pour un travail que j'aimais. C'est le moment où la musique a remplacé les études. J'ai fondé mon propre label, composé des musiques de pub pour Pizza Hut, produit un rappeur."

Son père, ses valeurs

Il a dit : "Mon père est un homme très respectueux et tolérant. L'important pour lui est que je fasse ce qui est important pour moi. Il m'a épaulé pour que j'emprunte mon propre chemin. On a une relation très forte. Papa comprend mon caractère. Il ne m'a d'ailleurs encore jamais dit que je devrais me couper les cheveux (...) Mes parents m'ont dit de ne pas prêter attention au statut social des gens, de ne pas me perdre dans le jeu social. D'être toujours près des hommes. Voir qui ils sont à l'intérieur et non pas ce qu'ils pourraient m'apporter."

Il avait dit : "Mon père est quelqu'un d'ouvert, de sensible et proche. Comme tous les parents, il veut naturellement s'assurer que je gagne bien ma vie et que je mène une vie rangée (...) Nous sommes très proches, tous les deux sensibles, avons des passions et le sens de la famille. Nous ne parlons pas de notre travail. Il a le sien, j'ai le mien. Et je ne lui dis pas : "Hé papa, écoute un peu ça". Tout ce que je sais, c'est qu'il a déjà acheté quelque chose que j'ai fait. Je pense que cela doit rester spontané (...) Mon père m'a appris que le plus grand risque dans la vie est de ne jamais prendre de risques."

Des idoles ?

Il a dit : "Je crois en Dieu, on ne peut pas avoir d'idoles terrestres. Je crois en l'honnêteté de l'homme et en la justice."

Il avait dit, évoquant son "amour pour Dieu", ne pas se reconnaître dans l'institution "Eglise", dont il ne fréquente pas les bancs, cherchant à "entrer seul en contact avec Dieu".

Son apparente timidité

Il a dit : "Je suis timide, c'est ma nature. Mais je ne le vois pas comme une maladie. Je suis plutôt réservé, je réfléchis avant de parler. Je ne me cache en aucune manière derrière ma musique. Oui, je suis timide, heureux et libéré de pouvoir vivre ma vie comme je le fais (...) Mon masque, mon pseudo signifie pour moi : laisse-toi aller, vas-y sans stress. Ça me décrit plutôt bien. Je me sens zen et je vais de l'avant."

Il avait dit : "Mes parents, je les en remercie, m'ont offert une enfance merveilleuse. Mais les enfants il n'y a pas que la vérité qui sort de la bouche des enfants, il y a aussi la cruauté. La cruauté de la vérité. Et j'étais déjà un solitaire, presque autiste. Je parlais peu, je préférais m'asseoir au pied d'un arbre et rêvasser (...) Mosey signifie aussi : ne te laisse pas stresser. C'est un peu le leitmotiv de mon existence."

Etre fils de président...

Il a dit : "Ma grand-mère disait toujours : 'Tout honneur est en même temps une punition.' Je me sens plutôt libre dans ma vie de fils de président. J'ai certes un garde du corps, que, par chance, j'apprécie beaucoup. l'avoir avec moi me permet de retrouver une liberté, de me sentir plus confiant. Ce n'est pas à moi d'être parano pour lui, mais c'est lui qui l'est pour moi ! (rires) Plus sérieusement, chaque chose a deux aspects. D'un côté, cela m'ouvre des portes d'être président de la République ; et quand les gens écoutent ma musique, je ne suis plus réduit à cela mais reconnu en tant que DJ Mosey. De l'autre côté, j'ai un garde du corps qui me suit comme une ombre. Ce qui me ramène à l'adage de ma grand-mère : dans n'importe quelle situation, il y a du positif et du négatif."

Il avait dit : "Dans le monde dans lequel j'évolue, seule la musique compte, peu importe d'où tu viens. Dans le milieu de la musique, d'aucuns m'ont peut-être accepté et d'autres rejeté, du fait que je suis le fils du président. Aujourd'hui, j'ai plus de confiance en moi, parce que je sais que je peux tout réussir, professionnellement et personnellement. Pas tant grâce à mon nom que grâce à moi-même."

Carla Bruni

Il a dit : "C'est une personne merveilleuse. A l'intérieur comme à l'extérieur. Sensible et intelligente. Je suis très fier de la compter dans la famille." Une collaboration ? "Je ne veux pas faire de mélange. Et puis elle a son propre style. Elle n'a pas besoin de moi pour briller musicalement, elle y arrive très bien toute seule. La famille, c'est la famille, et c'est bien comme ça."

Il avait dit : "Elle a une voix magnifique et est très talentueuse. Et a de beaux textes. Elle n'a pas besoin de moi, d'autant plus que je produis un genre différent, de l'urban et de l'électro. Et puis, comme je l'ai dit, je sépare famille et travail."

Vie publique, vie privée

Il a dit : "Ce que je préfère, c'est retrouver ma famille. Et aller chez un bon ami en Corse, avec ses nombreux moutons. En privé, je préfère caresser des moutons plutôt que d'aller en soirée."

Il avait dit : "Un minimum de vie privée, c'est bien."

 

Un effet d'écho que chacun interprétera comme il l'entendra : soit comme le discours policé d'un artiste peu gourmand de médiatisation, soit comme la profession de foi d'un jeune homme qui a la tête sur les épaules. Et la cote de popularité dont l'affranchi du clan Sarkozy commence à jouir (ailleurs qu'en France essentiellement) plaide pour lui.

Retrouvez l'interview parue fin août 2011 dans Blick.ch, et celle publiée en juillet par Bild am Sonntag.

G.J.