






Actrice incontournable du paysage culturel français, Anny Duperey ne s’est jamais contentée de jouer des rôles convenus, que ce soit à l’écran ou dans la vie. Son rapport à la maternité, qu’elle a exprimé à plusieurs reprises dans les médias et dans ses écrits, illustre cette posture singulière et profondément honnête. À contre-courant des représentations idéalisées de la mère parfaite, elle a su poser un regard lucide, souvent dérangeant pour certains, mais toujours d’une grande justesse sur cette expérience universelle. Mère de deux enfants, Gaël et Sara Giraudeau, nés de son union avec Bernard Giraudeau, Anny Duperey n’a jamais caché que la maternité ne lui avait pas été une évidence. Elle a notamment déclaré dans plusieurs entretiens qu'elle pensait ne pas être faite pour ça et contrairement à l’image d’une mère fusionnelle et entièrement dévouée, elle a déjà avoue s’être parfois sentie étrangère à son rôle.
Pour comprendre cette posture, il faut aussi considérer l’histoire personnelle d’Anny Duperey. Orpheline à l’âge de 8 ans, elle a perdu ses deux parents dans un accident domestique. Cette tragédie a laissé une empreinte indélébile dans son rapport à l’intimité, à la transmission et aux rôles parentaux. A l'occasion de la sortie de son livre intitulé Respire, c’est de l’iode ! (et autres évocations libres), aux éditions du Seuil, l'actrice s'est confiée à Maïtena Biraben pour son format baptisé Mesdames. Très franche et transparente, elle a avoué à la journaliste : "La maternité n’a pas été une évidence. Psychanalytiquement, devenir mère me mettait à la place de la morte. Ma mère était morte, donc si je mettais au monde...". "Bernard Giraudeau m’a dit un jour : 'Le refus de l’enfant à ce point est une forme de suicide'. Effectivement, c’était une forme de suicide de la nier, de ne pas avoir de suite dans le monde", a-t-elle poursuivi.
Sur la tristesse de la perte de ses parents, celle qui a été élevée par sa tante a confié : "J’étais encore en colère contre [mes parents], qui m’avaient laissée dans le grand monde, toute seule. (...) Je crois que quelque part, une part de cette colère voulait dire : 'Puisque c’est ça, tout s’arrêtera avec moi, il n’y aura pas de descendance, la catastrophe va s’arrêter là'". Dans son ouvrage baptisé Le voile noir, elle revient justement sur ce drame.
"Je voulais faire un livre hommage aux photos de mon père et les premiers textes qui sont venus étaient terribles ", avait-elle expliqué alors qu'elle était invitée sur le plateau de Vivement dimanche, sur France 3. Et de poursuivre : "J'ai compris très vite que j'allais écrire sur le deuil impossible. J'ai retrouvé dans un carnet d'enfance que je n'avais écrit qu'une seule page à propos de la mort de mes parents. Il était inscrit : 'Un jour il faudra que j'écrive mon livre.' Et quand j'ai vu ça, je me suis dit : 'C'est incroyable, à l'âge de 13 ans, j'avais déjà conscience que ce serait un livre et rien d'autre'".