Elle est l’une des actrices françaises les plus respectées au monde, mais aussi l’une des plus mystérieuses. Isabelle Huppert n’est pas de celles qui se racontent facilement. Rarement bavarde sur sa vie intime, elle préfère laisser ses rôles parler pour elle. Mais face à Audrey Crespo-Mara, l’incomparable interprète de La Pianiste et de Elle s’est dévoilée comme rarement auparavant. Avec sa voix calme, son regard franc et son élégance naturelle, elle a accepté de remonter le fil du temps, jusqu’à ses racines : l’enfance.
Icône mondiale du cinéma, élue meilleure actrice du XXIᵉ siècle par le New York Times, Isabelle Huppert étonne encore par sa simplicité. Loin de jouer la diva, elle désamorce les compliments avec humour, presque par réflexe. "Passé l’effet de surprise, je l’ai quand même pris comme une attention particulière au choix des films que j’avais fait. Ça m’a fait plaisir", glisse-t-elle avec pudeur. Une carrière monumentale, mais une femme terriblement discrète.
Lorsqu’Audrey Crespo-Mara lui demande si son goût pour la discrétion est un héritage familial, Isabelle Huppert esquisse un sourire. "Le goût du secret", c’est justement le titre du portrait qui lui était consacré. Et pour comprendre ce silence assumé, il faut revenir aux origines.
Elle est née dans une famille de cinq enfants, dans la banlieue parisienne. Son père, Raymond Huppert, dirigeait une entreprise de coffres-forts. Sa mère, Annick Beau, enseignait l’anglais. Une famille "brillante", dit-elle, mais dans laquelle elle n’a jamais ressenti de pression. Au contraire. Être la cadette lui a offert, selon ses mots, un espace unique.
"Oui, être la dernière d’une fratrie, ça peut donner beaucoup de liberté… Je me suis sentie très libre, très libre de faire ce que je voulais. Je n’ai pas ressenti de contrainte, c’était un sentiment très agréable." Cette déclaration en dit beaucoup sur la construction de l’actrice. Elle précise même que, contrairement à ce qu’on pourrait imaginer, elle n’a jamais vécu dans l’ombre de ses frères et sœurs. "La liberté n’a pas été entravée…", dit-elle simplement.
Plus tard dans l’entretien, évoquant ses propres enfants — Lolita, Lorenzo et Angelo, tous trois liés au cinéma — elle confie que la transmission s’est faite naturellement : "La transmission, ce n’est pas forcément volontaire. C’est une histoire de capillarité." Sans grande démonstration, Isabelle Huppert a reproduit ce qu’elle a reçu : une liberté tranquille.
Le portrait révèle alors un paradoxe fascinant : celle qu’on décrit parfois comme froide ou intouchable est une femme profondément libre, presque insoumise à tout ce qui pourrait la limiter. Et lorsqu’on lui parle de son rapport au travail, sa réponse dit tout de son tempérament : "Ce n’est pas un besoin. C’est ce qu’on fait par plaisir, on ne le fait pas par besoin. Disons que ça peut devenir une dépendance plutôt qu’un besoin."
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