





Lire La Fugue d'Aurélie Valognes, c’est lire l’histoire d’une femme qui prend ses clics et ses clacs et qui décide de partir. Dans un mouvement d’urgence, pour devenir elle-même. Un point de départ qui parle certainement à de nombreuses femmes. Mais La Fugue c’est aussi un livre qui évoque une terre, des éléments, une sororité, une résilience. Autant de thèmes qui s’inspirent d’un lieu que l’autrice a découvert, comme le personnage principal Inès, un peu par hasard.
Car la maison dans laquelle Inès va se reconstruire à travers, notamment, le passé de sa précédente occupante n’est autre que celle de Jane Birkin qu’Aurélie Valongues a elle-même achetée en 2024. “Une vieille demeure de 14 pièces" située sur les bords de l'abers Benoît, à Prat-ar-Coum, à Lannilis (Finistère). Si Aurélie Valognes ne connaît pas les mêmes déboires dans sa vie amoureuse que celle de son personnage principal, elle a pour rituel elle aussi de quitter mari et enfants pour écrire et cela dure plusieurs semaines chaque été. D'habitude, sa retraite s'effectue à Paris mais avec les JO 2024 elle a dû chercher ailleurs. Elle tombe alors sur une annonce présentant une maison de 400 m² dans Le Finistère... celle de Jane. “Quand je suis rentrée dans ce lieu qui est incroyable, j'ai ressenti tout de suite qu'il y a une âme artistique et puis très bienveillante. C'est une gentille maison (...) En fait, je me suis rendu compte que ce n'était pas seulement une maison qui ressemblait à celle de mes rêves, mais que c'était carrément la maison de mes rêves et la maison qui a appartenu à une femme exceptionnelle, une immense artiste que je respecte infiniment et qui est peut-être la gentillesse incarnée”, a expliqué l’écrivaine à France 3 régions Bretagne. Dans son livre, le personnage principal Inès voit aussi la maison qu'elle vient d'acquérir comme une bonne maison et comprend vite que sa précédente habitante était une femme extraordinaire. Le récit et la réalité se mélangent comme lorsque l'héroïne explique espérer que la demeure l'accepte. Aurélie Valognes avait utilisé exactement les même mots lors de cette interview : "On verra si la maison m'accepte, mais pour l'instant j'y ai écrit ce premier roman."
Dans le livre, Jane Birkin est présente à travers la maison, le personnage d'Anna (précédente occupante) mais inspire aussi d'autres personnages du livre. A Paris Match, Aurélie Valognes avait décrit Jane Birkin comme une femme "libre et forte", comme les femmes du roman qui sont toutes indépendantes, puissantes. Et puis, il y a ces objets laissés par Charlotte Gainsbourg et Lou Doillon, les filles de Jane Birkin, qui avaient eu la lourde tâche de devoir faire le tri dans les affaires de leur célèbre mère après sa mort. Mais elles "n’ont vidé les lieux que partiellement, avait expliqué Aurélie Valognes. Elles ont laissé des meubles, de la vaisselle, et même la plupart des livres de la bibliothèque". Et de poursuivre : "Des dizaines d’ouvrages en français et en anglais qui prennent la poussière. Des classiques de la littérature, de Victor Hugo à Lewis Carroll, et également de nombreuses biographies de rois et de reines, de Guillaume Le Conquérant à Elizabeth 1er." Comment ne pas faire le lien avec La Fugue qui compte parmi ses personnages principaux une bibliothèque qui comprenait notamment des livres en Anglais.
Comme l'avait expliqué l'auteure, elle a décidé de transformer ce lieu de résidence en maison d'accueil pour des écrivaines qui pourront de juin à septembre venir y travailler. "Il y a assez de chambres pour recevoir cinq femmes qui ont besoin d'un lieu calme pour écrire et n'ont pas les moyens de se l'offrir, avait confié Aurélie Valognes à Libération. Ce seront des femmes simples, comme moi." Là encore, un lieu de partage des talents que l'on retrouve dans le livre... mais il serait dommage d'en dire plus et de spoiler.