“C’est le meilleur ami de Jean-Pierre Foucault, appelez-le !" Lorsque le maire de Carry-le-Rouet, commune des Bouches-du-Rhône où réside la star de TF1, nous a donné ce conseil, on était loin de se douter de toutes les anecdotes que nous réservait Claude Moreau, un homme qui a fait la connaissance de l’animateur sur les bancs de l’école, et qui ne l’a quasiment jamais quitté puisqu’ils sont désormais voisins, dans un cadre idyllique, face à la mer. Pour Purepeople, ce copain d'enfance a accepté d’ouvrir sa malle aux souvenirs pour nous raconter son Jean-Pierre Foucault.
Je connais Jean-Pierre depuis que nous avons 13 ou 14 ans. Je connais tout, ou presque, de lui. Nous étions à l’école ensemble. Moi, j’étais dans une boîte à curé, rue des Bons-Enfants à Marseille, lui est arrivé une année après moi : j’étais en troisième, lui en seconde. Au début, on a failli se battre. Il était grand, toujours tiré à quatre épingles, cravate et veste pied-de-poule. Il en imposait. Je me suis dit : "Celui-là, c’est un con." Puis on s’est retrouvés assis à côté au même bureau, on s’est regardés, on s’est dit "merde…" Et plutôt que de se taper dessus, on s’est serré la main et on a vu comment ça avançait. Et ça a avancé très vite.
Jean-Pierre avait une passion pour la radio. Moi aussi. C’est devenu notre point commun. Moi, j’adorais les aspects techniques : j’écoutais les ondes courtes, j’avais même bricolé entre sa chambre et la mienne un relais téléphonique qui passait par le réseau interurbain, avec micro et haut-parleur. À peine sortis de l’école, une fois arrivés dans nos foyers respectifs qui étaient assez loin l’un de l’autre puisque lui était rue du Lapin-Blanc et moi, rue Madon, on se recontactait. On parlait pendant des heures de tout et de rien, juste pour être encore en lien.
La radio, la vraie, on a commencé à en faire très tôt. À Marseille, on connaissait Jimmy Guieu, un romancier d’anticipation touche-à-tout qui avait une émission sur France Inter. Grâce à la bonne connaissance qu’on avait des techniques, on allait faire des voix. Ils avaient une boîte à sons immense, deux mètres de haut et autant de large, avec tous les bruitages. Jean-Pierre et moi, on faisait des cris, des ambiances. Et puis un jour, on a fait une émission sur les arts décoratifs et Victor Hugo. On n’y connaissait rien, mais Inter mettait à notre disposition un technicien.
Notre vie entière était bâtie sur un mensonge permanent : on voulait avoir l’air plus vieux, plus sérieux, plus professionnels que nous ne l’étions. À l’école, on était des vedettes. Quand le prof nous donnait deux heures de colle, on disait : «C’est pas possible, on a une émission.» On arrivait même à abuser les profs. C’était notre manière d’exister.
© Abaca Press, Apaydin Alain/ABACA
Quand on était gamins, on rêvait déjà d’aventure. On s’était même mis dans la tête de faire venir les Rolling Stones à Marseille, salle Vallier. Jean-Pierre n’était même pas majeur. Ça a été un four monumental. Le type qui avait signé pour nous a perdu beaucoup d’argent. À l’époque, on faisait confiance trop facilement. Mais c’était ça, la jeunesse : il y avait plus de liberté. L’aventure était au bout du carrefour
Jean-Pierre a toujours aimé parler, s’exprimer, être sur le devant de la scène. Moi, j’ai toujours préféré être dans l’ombre, du côté des techniciens. Je mettais du matériel à sa disposition : micros, magnétophones. On se faisait des fausses émissions, on inventait des formats, on s’entraînait. La passion a fabriqué notre talent. Elle a surtout fabriqué Jean-Pierre.
Lui a commencé à travailler jeune et s’est très vite retrouvé à Paris. Il n’a pas fait son service militaire parce que son père avait été tué durant la guerre d’Algérie : il était pupille de la Nation. Moi, si. Dix-neuf mois dans la Marine. Il savait que j’étais coincé en Bretagne. Alors qu’il travaillait déjà à Europe 1, les fins de semaine, il venait me chercher à Brest avec sa R8 Gordini pour que je passe le week-end avec lui à Paris. Puis, il me ramenait en me laissant des bandes magnétiques pleines de musique. Qui a un ami capable de faire ça ? Pour un pauvre type qui faisait son service militaire, c’était précieux.
Je le vois aujourd’hui régulièrement car nous sommes voisins, à Carry-le-Rouet. Moi, j’ai posé mes valises : je ne sors presque plus de chez moi. Lui, le père Foucault, c’est un oiseau voyageur. Il est tout le temps en vadrouille. Je ne sais jamais où il est. Nos contacts sont réguliers mais rapides : on prend nos motos pour aller voir si notre bateau fonctionne toujours, on boit un café ensemble, on discute un peu. On n’a pas de grands discours philosophiques. On prend une bagnole, on roule une heure sans forcément s’adresser la parole. On se connaît tellement bien qu’on n’a pas besoin de mots.
Avec Jean-Pierre, j’ai toujours eu la même amitié. On est resté des plaisantins imbéciles, comme quand on était gamins. On a 15 ans dans la tête. Entre nous, on n’est jamais sortis de ça. C’est une amitié de dingue. Une vie entière.
Propos exclusifs ne pouvant être repris sans la mention Purepeople
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