La comédienne Catherine Sellers nous a quittés le 9 mars à Paris, à l'âge de 87 ans. Elle laisse derrière elle une carrière riche en oeuvres théâtrales et une formidable collaboration avec l'auteur Marguerite Duras. Ainsi, elle apparaît dans ses films Détruire dit-elle, La Femme du Gange, Jaune Soleil et la pièce Suzanna Andler. Elle est apparue sur scène pour la dernière fois dans le spectacle Chryssothémis, mis en scène par son mari pendant plus de quarante ans, Pierre Tabard. Elle a travaillé dans de nombreuses pièces pour la compagnie qui porte le nom de son époux, créée en 1984 : Horace, Phèdre et L'Amante anglaise en font partie. Les obsèques de Catherine Sellers auront lieu au crématorium du Père-Lachaise le jeudi 13 mars à 14h30.
Catherine Sellers a prêté sa voix à plusieurs documentaires et apparaît dans Stavisky, de feu Alain Resnais. Elle a été membre du jury du Prix Marguerite-Duras. Cette récompense revient alternativement à un livre, une pièce de théâtre ou une oeuvre cinématographique et, à partir de 2009, éventuellement à l'ensemble d'une oeuvre ou d'une carrière.
Dans une interview pour La Voix du Nord, la fille d'Albert Camus parlait de Catherine Sellers : "Dans mon livre Le Monde en partage. Itinéraires d'Albert Camus, j'évoque Maria Casarès, Catherine Sellers (avec qui Camus a eu des liaisons). Des femmes au-dessus de la moyenne, que je respecte." En effet, l'actrice Sellers avait conquis l'auteur de L'Étranger, comme le rappelle L'Express : "En 1956, il repère une petite jeune femme, comédienne gracile et cultivée, Catherine Sellers, dans La Mouette de Tchekhov. Il la fait jouer dans Requiem pour une nonne, pièce adaptée du roman de Faulkner. Dans ses Carnets, Camus note, vaincu : 'Pour la première fois depuis longtemps, touché au coeur par une femme, sans nul désir, ni intention, ni jeu, l'aimant pour elle, non sans tristesse'."
De Catherine Sellers, Marguerite Duras dira : "Elle joue toujours plus loin que la scène, toujours. Et à la place toujours dangereuse. Et toujours, elle donne ce sentiment bouleversant que cette place – de laquelle elle vous renvoie le rôle – est la place véritable de ce rôle, même si vous, vous ne l'aviez pas encore aperçue. S'agit-il d'une compréhension générale ? Peut-être, oui, si par ce mot on entend aussi un savoir qui s'ignore. Car elle n'en dit rien, ne l'impose en aucune manière, ne sait peut-être même pas, en effet, qu'elle en est porteuse : quand elle joue, parfois, elle paraît étonnée comme par la découverte de la pièce. Oui c'est ça, je crois qu'il s'agit ici de la dimension souveraine de l'acteur, de l'ouverture naturelle qu'il opère sur le rôle, de la projection de ce rôle hors des limites privatives de la pièce qui le contenait, de son transfert dans le dehors du théâtre, de son jeu originel." (Extrait de son curriculum vitae)