Le Festival d'Avignon bat son plein, mais l'heure n'est pas à la célébration pour tout le monde… Une enquête de Libération s'intéresse à l'envers du décor d'une célèbre école de théâtre parisienne, le Laboratoire de l'acteur, dirigée par Hélène Zidi, la fille du réalisateur Claude Zidi. Là-bas, selon plusieurs témoignages, certains élèves masculins auraient pris "le melon" tandis que les jeunes femmes feraient face à un système de violences psychologiques et sexistes. Selon Ambre, ancienne élève, qui s'est confiée à Libération, un après-midi de novembre 2020, seule sur scène face à ses camarades, elle aurait subi des remarques humiliantes de la fondatrice. "T'es complètement crispée, coincée. Tu veux rester figurante toute ta vie ?", lui aurait balancé Hélène Zidi qui aurait exiger une improvisation glaçante : jouer une mère se prostituant et mimer une fellation. Ambre tente alors de résister, en vain. "J'étais sidérée. C'est difficile à décrire, d'autant plus que j'ai des traumatismes liés à cet acte sexuel", a-t-elle confié.
La scène se serait conclu par cette phrase de la maman de Lola Zidi : "Rien à faire, elle a des blocages. C'est pourtant pas si difficile de mimer une fellation". Ambre n'est pas seule à dénoncer les dérives puisqu'une vingtaine de comédiennes, également interrogées par Libération, dresseraient le portrait d'une directrice au comportement autoritaire, au favoritisme tranché et aux remarques sexistes décomplexées. Lise, de la promo 2016, décrit les "chouchous" d'Hélène Zidi comme des "mecs virils, style Apollon, qui prennent vite le melon et se sentent supérieurs à nous". Olga, elle, raconte des remarques sur son poids… Hélène Zidi l'aurait félicitée d'avoir maigri entre deux stages, avant de déraper : "Il faut que tu te ressaisisses, tu ne veux quand même pas jouer des rôles de grosses, déjà que tu as un certain profil". Olga lutterait encore aujourd'hui contre des troubles du comportement alimentaire et une dysmorphophobie sévère. Pourtant, l'école ne manque pas de prestige. Fondée en 2001 par la fille du réalisateur Claude Zidi, elle a vu passer des talents comme Tahar Rahim, Raphaël Quenard ou Alexis Manenti.
© BestImage, DOMINIQUE JACOVIDES / BESTIMAGE
Le site vante ses "marraines" prestigieuses en les personnes de Doria Tillier, et Aïssa Maïga. Tous contactés, aucun n'a souhaité réagir.
Le secteur de la culture est "surexposé" aux violences sexistes, a notamment conclu la Commission d'enquête parlementaire conduite par Sandrine Rousseau. Près de 120 heures d'audition, 86 recommandations, une alerte forte… mais une profession encore réticente à se regarder en face. Les règles implicites, les abus de pouvoir, les zones grises entre exigence artistique et abus de faiblesse, sont autant de failles dans lesquelles s'engouffrent les violences. Et si certaines figures montantes prennent la grosse tête, d'autres, comme Ambre, en ressortent brisées…
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