Ce n’était censé être qu’une cérémonie. Un soir de février 2005, dans le faste du Châtelet, où le gratin du cinéma français célébrait ses lauréats. Cette année-là, Olivier Marchal était pourtant l’un des hommes forts de la compétition des César, grâce à son polar noir 36 Quai des Orfèvres, nommé huit fois, dont Meilleur film, Meilleur réalisateur et Meilleur acteur. Mais ce soir-là, malgré les acclamations du public et une belle performance au box-office, il repart bredouille. Et plus encore, blessé.
Ce n’est pas tant la défaite qui lui reste en travers de la gorge, mais surtout l’ambiance qu’il décrit aujourd’hui comme "hypocrite" et "hautaine". Vingt ans plus tard, Olivier Marchal, ex-policier devenu cinéaste, n’a toujours pas digéré. Il ne mâche pas ses mots auprès de Télé Loisirs : "il aurait vraiment fallu qu’on vienne me chercher avec un pistolet sur la tempe pour que j’y retourne. Je n’y vais jamais. C’est une des pires soirées que j’ai passées".
À la radio comme dans la presse, le réalisateur de Bastion 36 sur Netflix n’a pas retenu ses coups. Sans détour, il compare l’ennui qu’il a ressenti ce soir-là à celui d’un certain Will Smith, également invité à la cérémonie : "Il se faisait chier autant que moi." Le constat est sans appel. Marchal, allergique aux jeux de faux-semblants, préfère le vin entre amis aux coupes de champagne entre collègues.
Il se souvient avec amertume du fameux dîner d’après-César, organisé au Fouquet’s pour les stars : lui a préféré s’éclipser. "Je suis allé dans un petit bar à vin avec mes potes. On a fini la soirée entre gens normaux." Depuis, il boycotte volontairement les César, comme Gérard Lanvin, qu’il admire et évoque en exemple : "Moi je suis comme Gérard Lanvin qui a vendu ses deux Césars aux enchères et l’argent il l’a donné à une œuvre caritative".
Ce père de quatre enfants ne se reconnaît plus dans ce cinéma français. Il regrette une époque révolue, celle de Gabin, Signoret, Alain Delon, Yves Montand ou Romy Schneider, qu’il qualifie de "classe". Des artistes qu’il considère comme incarnant un cinéma vrai, populaire et digne. Et de conclure : "Je préfère aller à un repas avec mes potes de l’antinonde que d’aller à une soirée des César."
À ses yeux, les César ne récompensent plus le talent, mais l’appartenance à un réseau, un microcosme d’initiés. Et l'acteur et cinéaste français n’a de cesse de dénoncer ce qu’il appelle "l’entre-soir", cette logique de copinage à laquelle il ne veut pas se plier. "Tu vois Georges Lothaire, j’étais pote avec Georges Lothaire, et il a eu les larmes aux yeux Georges Lothaire, il a fait 60 millions d’entrées et il n’a jamais eu aucun prix, même pas un César d’honneur. Rien !" dénonce-t-il. Olivier Marchal n’attend plus rien des César pointant du doigt "tous les blaireaux" qu’il y a vu passer.
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