Bernard Arnault doit faire le choix entre ses cinq enfants issus de deux mariages – Delphine, Antoine, Alexandre, Frédéric et Jean –, pour leur laisser un jour les rênes de LVMH. Quant à François Pinault, le milliardaire a pour sa part misé sur son cadet François-Henri pour lui succéder aux commandes du groupe Pinault SA et Kering. Mais il y a bien un dirigeant qui semble préférer faire comme s'il était immortel, il s'agit de Jérôme Seydoux. À 90 ans, le puissant patron de Pathé et seul maître à bord refuse d'évoquer l'avenir du groupe dont il a lui-même hérité. Et pourtant, au sein de la famille nombreuse de cet homme autoritaire, les héritiers ne manquent pas. Mais pourtant ce n'est pas une question actuelle. À tel point que même au sein des couloirs de Pathé, le sujet reste tabou. Dans les pages de Succession, enquête des grands reporters du Monde Raphaëlle Bacqué et Vanessa Schneider, un ancien salarié s'en amuse. "À 50 ans, il (Jérôme Seydoux, ndlr) disait qu'il s'arrêterait dix ans plus tard. À 60 ans, il jurait de prendre se retraite à 70. Depuis qu'il a largement dépassé les 80, il ne parle plus de rien !"
Il refuse donc d'envisager sa propre succession. Alors qu'il était déjà âgé de 87 ans quand l'ouvrage a été écrit, on apprend : "Il se rend à son bureau tous les jours, s'investit avec énergie dans de nouvelles productions, sans dire à quiconque qui prendra sa place le moment venu." Dans les couloirs de Pathé, ses obligés évoquent seulement à voix basse l'après, "mais personne n'oserait poser tout haut la question". C'est en 2013 que Jérôme Seydoux avait accepté d'évoquer le sujet avec Le Monde, depuis il s'est y refusé. À l'époque, l'homme qui est parmi les 500 plus grandes fortunes de France, confiait : "Je ne suis pas un artiste, mais je partage avec eux la conviction qu'il ne faut pas prendre sa retraite et qu'il convient de mourir en scène." Ce sujet tabou, le businessman ne l'évoque d'ailleurs pas plus avec ses plus intimes amis. Parmi lesquels quelques noms célèbres comme Philippe Labro, le producteur Paul Rassam, l'essayiste Alain Minc ou encore Serge July, ancien boss de Libération.
Mais même si ce sujet est tabou, qui pourrait donc succéder à Jérôme Seydoux à la tête du groupe Pathé ? 77e fortune française selon Challenges en 2021, il a huit enfants et un grand nombre de petits-enfants. Les quatre aînés (Carlotta Alexis Ludovic Henri Seydoux (le père de Léa Seydoux), fruits de sa première union avec Hélène Zumbiehl) ont aujourd'hui la soixantaine et se sont construits loin de Pathé.
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Sophie Desserteaux-Bessis, deuxième femme du patriarche, veuve de son ancien associé Christophe Riboud, elle, a tenté de mettre leurs enfants au sein de la société. Il y a Jules, le plus jeune fils de Jérôme Seydoux, fruit de ses amours avec Sophie.
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Puis Pénélope, Thomas et Raphaëlla, les enfants que Sophie avait eus avec Christophe Riboud, que celui-ci a décidé d'adopter. Pénélope travaille comme directrice générale de la fondation Pinault ; Thomas a évolué au sein du groupe avant de s'envoler vers Londres ; et enfin Jules né en 1991 y a lui aussi occupé des postes de manière éphémère. Si aucun n'a semble-t-il fait l'affaire, savoir ce que deviendra Pathé dans dix ans est le cadet des soucis de Jérôme qui "n'a aucune vision dynastique". Face à un tableau familial morcelé, une succession reposant sur une personne extérieure au clan a paru longtemps la solution envisagée par l'homme. "Mais depuis trente ans, dès que le nom d'un éventuel dauphin commence à être évoqué, ce dernier finit cloué au pilori". Et si l'empire revenait à Sophie, l'épouse, à la tête de la fondation ? Il a un moment caressé cette idée mais la principale intéressée a toujours assuré le contraire. Tout semble donc encore totalement flou pour l'avenir de Pathé, actuellement entre les mains d'un homme visiblement immortel.
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