
Heureuse en famille et en amour, Julie Depardieu se consacre depuis des années à sa passion pour la musique classique, à des lectures et aux tournages de la série télé Alexandra Ehle sur France 3. En avril dernier, elle participait au festival Georges Bizet à Bougival. C’est dans cette petite commune de 9000 habitants, située dans les Yvelines, où il s’était installé que le compositeur de l’opéra Carmen est mort il y a 150 ans et où se trouve sa maison. La ville est aussi célèbre pour avoir été la résidence du footballeur brésilien Neymar à l’époque où il jouait à Paris. Il avait alors racheté le domicile de… Gérard Depardieu ! Bougival c’est surtout la commune où Julie Depardieu a grandi en compagnie de ses parents et de son frère, Guillaume. Ce dernier est décédé en octobre 2008 à l’hôpital de Garches (Hauts-de-Seine), tout proche, d’une infection due à un staphylocoque doré. L’ex-acteur et chanteur est enterré à Bougival où il avait créé la fondation Guillaume-Depardieu pour regrouper les témoignages de cas similaires au sien et représenter les 800 000 cas annuels d’infections nosocomiales, c’est-à-dire contractées à l’hôpital.
Ses obsèques avaient été célébrées le 17 octobre dans l'église locale, datant du XIIe siècle, en présence des réalisateurs Pierre Salvadori et Josée Dayan qui s’étaient exprimés à l'office. À l'issue de la crémation, ses cendres furent inhumées au cimetière de Bougival et sa stèle ornée par une illustration du Petit Prince. Ce jour-là, Julie, sa sœur cadette, s’était adressée à l'assistance pour évoquer la souffrance de son frère, amputé en 2003 à la suite d'un accident de moto qui lui avait valu dix-sept opérations : "Sa fille Louise dit qu'il avait tellement mal, qu'il est mieux là-haut."

Elle aussi avait tellement mal de le voir souffrir qu’elle avait, peu avant la disparition de son aîné, quitté Bougival. “On habitait tous à Bougival, ma mère, lui, moi, chacun dans sa maison. On a été élevés là-bas, Guillaume et moi. On est arrivés en 1976. Il n'a jamais voulu habiter Paris, expliquait t-elle en 2013 dans le journal Le Monde. Moi, je viens d'y revenir. J'étais partie de là-bas juste avant qu'il meure, je ne sais pas pourquoi. Comme une envie de pisser, il fallait que je me casse. J'ai fait ma valise, j'ai fait tout mon déménagement en août. Il est mort en octobre.”
De 2008 à 2013, Julie a donc vécu à Paris. “Ses meilleurs amis, ses connaissances, c'était que des estropiés, des gens qui n'y arrivaient pas, des gens qui n'avaient rien, des rejetés. Il passait toutes ses journées dans le même café, Les Trois Billards, à lire son journal. Sa vie, c'est celle d'un mec qui vit dans un village et va au café. Il y avait toujours chez lui plein de gens qui n'avaient pas de quoi, qui n'avaient pas de lit. Une fois, il est même rentré sans pantalon ni chaussures. Je lui dis : 'Qu'est-ce que tu fous ?‘ Il dit : 'Je sais pas, y avait un mec qu'en avait pas.' Sur sa tombe, à Bougival, il y a ces gens-là qui viennent lui mettre des petits cadeaux, des mots, des trucs de rien.”

Elle se souvient également d’un frère qui marchait beaucoup dans la commune. “Il lisait Rimbaud du matin au soir. Si je vais fouiller chez lui, à Bougival, je suis sûre que je retrouve des trucs. Tout est resté en l'état. Parce qu'on est tous traumatisés. Et puis, là où la plupart des gens sont obligés de tout évacuer, nous, nous avions la possibilité de garder la chambre telle quelle. Personne n'ose y aller.” En 2013 pourtant, déjà en couple avec Philippe Katerine et enceinte de leur second enfant, elle a décidé de retourner y vivre. “Quand j’habitais Paris, je me sentais oppressée, a expliqué Julie dans Paris-Match en 2021. Je me laissais tenter par trop de sorties, de fêtes. J’ai eu besoin de décompresser. Je suis revenue ici, où j’avais grandi. Dire que je m’étais juré, à 20 ans, de ne plus y mettre les pieds !”
Avec leurs enfants Billy et Alfred (12 et 13 ans), ils profitent d’une vie simple et équilibrée. “On se couche tôt, on galère pour faire faire les devoirs. Le week-end, nous allons au marché. On se balade en forêt avec notre chienne Zouzou." Avec le temps, le souvenir de Guillaume est devenu moins douloureux, plus tendre :“Je rêve souvent de mon frère, je le sens davantage présent que lorsqu’il était vivant. A sa mort, j’ai perdu ma moitié. Je n’avais plus envie de vivre, ma peine était immense. Maintenant, je suis convaincue qu’il est mieux quelque part qu’ici-bas. Cela me rassure. La mort n’est pas si dégueulasse.” Cette nouvelle sérénité, elle la doit à Bougival. Et, pour cela, elle lui sera éternellement reconnaissante.