"Je suis mort ce jour-là" Six mots que Jean-Louis Trintignant ne cessait de répéter depuis la disparition de sa fille, Marie Trintignant, ce triste 1er août 2003, suite aux coups portés par son compagnon de l’époque, Bertrand Cantat.
Invité à l’introspection suite à cette terrible perte par Mireille Dumas dans l’émission Vie privée, vie publique, l’acteur d’Un homme, une femme se souvenait des derniers moments passés avec sa fille tant aimée. "Souvent j’ai passé du temps avec Marie, quand on se quittait, je sentais qu’elle pensait que c’était peut-être la dernière fois qu’elle me voyait, racontait Jean-Louis Trintignant. En fait, la dernière fois qu’on s’est vus, on ne savait pas que c’était elle qui ne serait pas là la prochaine fois. Vous savez, à partir d’un certain âge on est tous entourés de morts…"
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Maintes fois interrogé sur Bertrand Cantat, Jean-Louis Trintignant balayait d’un revers de la main tout commentaire sur l'ultra-violence, soulignant – juste – son incommensurable douleur d’avoir perdu un de ses deux enfants. "Perdre sa fille, c’est inadmissible, inacceptable, déclarait l’acteur à Mireille Dumas. Je ne sais pas comment faire."
Avouant avoir pensé au suicide après la disparition de sa fille, Jean-Louis Trintignant ajoutait : "La mort de Marie fut la plus grande souffrance de ma vie. Il était impossible d’imaginer un jour sans entendre sa voix, sans voir son sourire. Rien au monde n’aurait pu m’atteindre davantage." La vie n’avait plus de sens pour l’artiste à vif. "J’étais enfermé dans une douleur négative. Je pouvais rester trois ou quatre heures les yeux dans le vague à ne rien faire. Il m’est arrivé la pire des choses qui puisse m’arriver ", la perte de la personne qu’il "aime le plus au monde." "Donc maintenant, tout ce qui m’arrive, ce n’est pas grave."
Et la faucheuse n’en avait pas fini avec Jean-Louis Trintignant, qui déclarait en 2017 être atteint d’un cancer de la prostate qu’il refusait de soigner. Interrogé par Nice-Matin sur sa santé un an après l’annonce de son cancer, le comédien déclarait : "Je ne me bats pas. Je laisse faire. Je ne fais pas de chimio", et dédramatisait en ajoutant : "Avant j’avais peur du cancer. Plus maintenant, j’en ai un ! Quand je signe des autographes - comme je ne vois plus grand-chose, c’est difficile mais bon - je signe Jean-Louis Trintignant et je précise en dessous à la fin de sa vie." L’agonie sera longue puisqu’elle durera plusieurs années. Cinq exactement. En novembre 2021, dans Paris Match, son ex-épouse Nadine Trintignant avait annoncé que l’acteur perdait "peu à peu la vue". Il faudra attendre ce satané 17 juin 2022 pour que la France ne perde l’un de ses plus grands acteurs. Selon beaucoup de proches, Jean-Louis Trintignant se serait éteint plus de tristesse qu’accablé par son cancer…
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Quelques semaines après la disparition de Jean-Louis Trintignant, son biographe répondait aux questions de Femme Actuelle suite à la sortie de son livre Jean-Louis Trintignant, une histoire de famille. Laurent Del Bono ne cachait pas sa tristesse. "Je savais qu’il était très mal. Il ne voyait presque plus, il avait le diabète et ne pouvait pratiquement plus bouger, révélait le journaliste. Il était dans un état de souffrance. C’est bizarre quand on est sur la fin d’une biographie d’apprendre que la personne est décédée. Mais d’un autre côté, il y a une logique. La personne est morte et la biographie peut s’écrire dans son entièreté, le point final est mis."
Le trauma d’avoir perdu sa fille dans une telle situation, Jean-Louis Trintignant l’a vécu sans trop savoir comment réagir… "Lorsqu’il a appris la mort de sa fille, sa réaction a été le silence. Et la culpabilité, racontait Laurent Del Bono à Femme Actuelle. Il s’est senti coupable de ne pas avoir été à Vilnius alors qu’il aurait dû y aller. Il a toujours pensé que s’il avait été là, sans doute, cela ne se serait pas passé. Il a eu cette phrase très belle à l’enterrement : ne pleure pas de l’avoir perdue, mais réjouis-toi de l’avoir connue."
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L’enterrement de sa fille Marie, Jean-Louis Trintignant le vivra dans les allées cossues du célèbre cimetière parisien du Père-Lachaise. Un choix qui n’était pas le sien… "Quand Marie est morte, il aurait aimé qu’elle soit inhumée en Provence, d’où sa famille est originaire, révélait Laurent Del Bono. Nadine préférait qu’elle soit enterrée à Paris pour pouvoir aller se recueillir sur la tombe de sa fille. Il s’est plié à son choix." Quelques années plus tard, en 2010, le réalisateur (et père adoptif de Marie Trintignant) Alain Corneau, rejoignait le caveau du Père-Lachaise, suite à un cancer des poumons. Compagnon de Nadine Trintignant pendant des decennies, le réalisateur de Tous les matins du monde avait fini par adopter les enfants Trintignant, avec l'autorisation de Jean-Louis qui avait juste demandé en guise de clin d'oeil : "mais ce seront toujours mes enfants quand même ?"
Jean-Louis Trintignant – lui – restera campé sur ses positions de provincial arrivé par hasard à Paris et finira par être inhumé au cimetière du Pont de Justice de Nîmes, à plus de 700 kilomètres de la tombe de sa fille. "Jean-Louis Trintignant est très attaché à ses racines et se considère comme un provincial à Paris, ville qu’il n’a jamais vraiment aimée, précisait Laurent Del Bono auprès de l’hebdomadaire Femme Actuelle. Il y est retourné dès qu’il a pu et est enterré à très peu de kilomètres de là où il est né, comme toute sa famille sur plusieurs générations."
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